Avec la menace d’une hausse de la taxe sur les jeux d’argent qui plane sur l’industrie britannique, certains des plus grands opérateurs resserrent leurs dépenses et prennent des mesures d’évitement.
La maison mère de Sky Bet, Flutter, a déplacé le siège du bookmaker britannique de Londres vers Malte, une décision claire et nette qui pourrait réduire de plusieurs millions de livres ses obligations fiscales au Royaume-Uni.
Ce changement n’a pas échappé à l’ancien Premier ministre Gordon Brown, qui a demandé aux députés du comité du Trésor d’examiner si les sociétés de paris utilisent des failles pour éviter de payer des taxes britanniques.
Parallèlement, William Hill a discrètement révélé dans ses conditions générales que 13 marchés nationaux fermeraient à partir du 2 décembre, une mesure de réduction des coûts qui touchera des clients en Afrique, en Amérique latine et en Asie.
Sky Bet pourrait économiser 55 millions de livres
Dan Neidle, de Tax Policy Associates (TPA), a fourni l’analyse technique pour un reportage d’ITV News concernant l’éventuelle optimisation fiscale de Sky Bet en déménageant à Malte.
Neidle estime que la manière dont Sky Bet a structuré sa relocalisation pourrait permettre à l’entreprise d’économiser 55 millions de livres de taxes, sur la base des revenus de l’année dernière.
Au lieu de créer une société maltaise pour exploiter son activité, Sky Bet a créé une autre entreprise britannique, SBG Sports Limited, avec une succursale à Malte.
Une entreprise internationale implantée à Malte peut effectivement payer un taux de fiscalité bien inférieur aux 35 % appliqués aux entreprises locales, le taux pouvant descendre jusqu’à 5 %.
Sur la base des bénéfices FY24 de Sky Bet soumis à l’impôt sur les sociétés du Royaume-Uni à 25 %, ce déménagement aurait permis une économie potentielle de 31 millions de livres.
Neidle a également mis en évidence une potentielle faille de TVA qui réduirait la TVA sur le budget marketing de Sky Bet, ce qui, encore une fois sur la base des chiffres déclarés l’an passé, aurait pu permettre d’économiser 24 millions supplémentaires.
Dans sa réponse à ITV News et TPA, Flutter n’a pas nié avoir créé un scénario permettant d’éviter des charges de TVA importantes, mais a évoqué à la place les défis du marché.
« Flutter a payé plus de 700 millions de livres en taxes au HMRC l’année dernière, et nous employons plus de 5 000 personnes au Royaume-Uni, dont près de 2 000 à Leeds et 600 à Sunderland », peut-on lire dans leur réponse.
« Comme la plupart des entreprises mondiales, nous nous efforçons constamment de rester compétitifs et efficaces, et de nous donner les meilleures chances de réussir dans un environnement incroyablement difficile.
« Le défi est encore renforcé par la récente réforme de la Gambling Act, l’essor des opérateurs illégaux non régulés, et la possibilité d’augmentations fiscales dans le prochain Budget.
« En juin de cette année, après avoir migré Sky Bet vers la même plateforme technologique que nos autres marques, nous avons décidé de transférer un certain nombre de rôles commerciaux et marketing vers notre centre commercial à Malte – où Flutter emploie déjà plus de 750 personnes.
« Cette décision a été prise pour plusieurs raisons stratégiques et commerciales, et aura certaines implications fiscales.
« Mais Flutter reste engagé au Royaume-Uni et Sky Bet continuera de payer l’impôt britannique sur ses bénéfices. »
Gordon Brown a réagi au reportage d’ITV News en déclarant qu’il soulevait « de sérieuses inquiétudes quant à une possible optimisation fiscale qui nécessite une enquête approfondie ».
William Hill se retire de 13 pays
La maison mère de William Hill, evoke, a publié des prévisions solides pour FY25 dans son rapport du troisième trimestre.
Cela malgré l’annonce qu’elle devra envisager la fermeture de jusqu’à 200 boutiques William Hill, mettant 1 500 emplois en danger si le Labour augmente les taxes sur les jeux d’argent dans le budget du 26 novembre.
C’est un aperçu sombre d’un avenir alourdi par les taxes, qui a été répété par d’autres acteurs comme Betfred, qui a averti que 7 500 emplois seraient menacés dans son entreprise, et Paddy Power, dont les récentes fermetures pourraient n’être que les premières d’une longue série.
Menace fiscale sur les boutiques de paris britanniques

Les poids lourds du secteur britannique des paris ont mis en garde contre une hausse des taxes sur les jeux d’argent.
Outre William Hill, les autres marques d’evoke incluent 888 et Mr Green, et bien que le Royaume-Uni et l’Irlande restent les zones clés, d’autres marchés principaux de la division internationale du groupe comprennent l’Italie, le Danemark et la Roumanie.
Le moment choisi pour fermer ses activités dans 13 marchés de niche, une semaine avant le Budget britannique, semble appuyer l’avertissement d’evoke selon lequel l’entreprise devra réduire ses coûts face à une hausse de la fiscalité.
Voici les 13 pays concernés, répartis sur trois continents :
Afrique : Angola, Burkina Faso, Cameroun, Kenya, Mozambique, Nigeria, République du Congo, République démocratique du Congo et Somalie.
Amérique latine : Bolivie et Nicaragua.
Asie : Népal et Vietnam.
Les clients de ces pays ont été informés qu’à partir du 2 décembre, ils n’auront plus accès aux services de William Hill.
Tous les paris effectués avant cette date seront honorés, mais les paris encore ouverts à ce moment-là seront annulés et les mises remboursées.
Les comptes resteront ouverts pendant un mois supplémentaire pour permettre aux utilisateurs de retirer leurs fonds avant la fermeture définitive le 5 janvier 2026.
Evoke ne quitte pas complètement ces régions, puisqu’en 2022 l’entreprise a réalisé un investissement stratégique pour lancer la marque 888 en Afrique.
Cela a impliqué la création d’une coentreprise 888AFRICA avec cinq vétérans locaux du secteur, ce qui peut laisser penser que le retrait de la marque William Hill évite une concurrence interne dans les mêmes pays.
Tous les regards se tournent maintenant vers la chancelière du Labour, Rachel Reeves, et son Budget de la semaine prochaine.
On s’attend largement à ce qu’elle annonce une révision de la fiscalité sur les jeux d’argent au Royaume-Uni et une augmentation des taxes — avec comme seule question : de combien ?